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mardi, juillet 8, 2025
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    Zoom sur Khalil Touhami, premier joueur marocain du championnat togolais

    Dans le silence d’un vestiaire togolais, entre chaleur et terrains à moitié synthétiques, un nom marocain résonne désormais pour la première fois : celui de Khalil Touhami. Cette année, l’ailier est devenu le premier joueur marocain à évoluer dans le championnat togolais, au sein du club d’Unisport de Sokodé. Une aventure loin des projecteurs, mais portée par une détermination et un désir profond de se réinventer. Zoom sur une expérience plus que singulière qui nous a été raconté en exclusivité par son principal concerné.

    Formé à l’école du Raja de Casablanca, Khalil a longtemps évolué dans l’ombre des grands circuits, en multipliant les expériences. De la Tunisie à la Turquie, en passant par le Golfe et le Maroc, il a connu plusieurs environnements, plusieurs styles de jeu. Avec, toujours, le même objectif : jouer, apprendre, avancer. « Je voulais me relancer, repartir de zéro. Le Togo s’est présenté comme une opportunité inattendue, mais sincère. J’ai senti quelque chose de vrai dès le premier contact », nous confie-t-il.

    L’opportunité arrive via son agent, alors qu’un départ au Bénin était initialement envisagé. Mais les échanges avec le président et le staff d’Unisport, pensionnaire de la D1 Lonato, le convainquent. Le choix du Togo devient une évidence, presque une nécessité. « Le coach m’a directement mis à l’aise. Et humainement, j’ai senti une envie, une chaleur… J’avais besoin de ce genre de projet. »

    Sokodé, une terre d’accueil insoupçonnée

    Lorsqu’il débarque à Lomé, capitale du Togo, Khalil est d’abord frappé par la chaleur et la simplicité des lieux. Loin des infrastructures modernes des clubs du Golfe ou même du Maroc, il découvre une réalité plus brute. Le président du club vient lui-même l’accueillir à l’aéroport. Le coach l’emmène faire le tour de Sokodé. « Ça m’a tout de suite mis à l’aise. Ce n’est pas courant que les dirigeants prennent le temps de t’intégrer humainement. »

    L’installation est modeste mais confortable : une chambre dans un hôtel de la ville, une routine organisée autour du football. Rapidement, il sent que quelque chose se passe. Dans l’équipe, l’alchimie est naturelle. Sur le plan humain, il découvre un peuple qu’il qualifie d’être « d’une gentillesse rare ». « Que ce soit les coéquipiers, le staff ou même les gens dans la rue, j’ai toujours été accueilli avec respect. Ce n’est pas un pays riche, mais l’humain y est précieux », nous explique-t-il.

    Même les supporters, parfois méfiants avec les étrangers dans d’autres contextes, lui font une place à part. « Dans d’autres villes, les gens me saluaient, me demandaient des photos. C’est fort, surtout quand tu viens de loin et que tu penses être un inconnu. »

    Un football rugueux, physique

    Le choc culturel s’accompagne d’un choc footballistique. Le championnat togolais est exigeant, mais dans un registre très différent de ce que Khalil a connu. Tous les matchs se jouent quasiment à 15h30, souvent sous une chaleur accablante. Les pelouses ? Un mélange d’herbe, de terre, de synthétique. Le jeu est aérien, frontal, basé sur la puissance. « Moi je viens d’une école plus technique. J’ai dû changer ma manière de jouer. M’adapter. Me battre. C’était frustrant au début, mais j’ai compris que c’était une autre culture du football. Et ça m’a fait grandir », explique-t-il.

    Aligné en ailier gauche dans un système en 4-3-3, il est aussi utilisé à droite, voire en soutien d’un attaquant. Son rôle est clair : faire la différence. « Le coach m’a dit : tu es là pour apporter un plus. Ton bagage technique, ta vision du jeu, ton expérience, c’est ça que je veux voir sur le terrain. »

    Khalil n’a donc pas mis longtemps à s’illustrer. Pour son tout premier match, à l’extérieur, il entre en seconde période face à l’AS Tambo, délivre une passe décisive et contribue à la victoire 4-1 des siens. « Ce jour-là, j’ai compris que j’étais vraiment attendu. Même les supporters adverses m’applaudissaient. C’est rare, ce genre d’instant. »

    Arrivé à la mi-saison dans son nouveau club, il dispute huit rencontres. Son impact, malgré le temps réduit, est remarqué. Il devient un visage familier, un point de repère, un « étranger » respecté. Mais ce statut implique aussi une pression permanente. « Tu ne peux pas te louper. Les gens viennent voir ‘le Marocain’. Ils veulent que tu sois le meilleur sur le terrain. » Sportivement, le club termine huitième du championnat de première division.

    Une vie dédiée au travail

    À Sokodé, Khalil vit pour le football. Sa journée commence avant le lever du soleil : entraînement à 6h, retour à l’hôtel, repos, déjeuner léger. L’après-midi, il enchaîne avec une séance personnelle, soins ou musculation improvisée. Le soir, il cuisine seul ou mange rapidement. Pas de sortie. Pas de distractions. « Je me suis mis en mission. J’ai coupé avec tout. Ici, tu n’as rien à faire sauf t’entraîner. Alors j’ai utilisé ce temps pour progresser physiquement. »

    Cette discipline lui a permis de regagner en force, en vitesse, en explosivité. Il parle d’un renouveau physique et mental. « Je me sens plus complet aujourd’hui. L’intensité physique t’oblige à te réinventer. »

    Aujourd’hui de retour à Casablanca, Khalil a des contacts ailleurs, des pistes au Maroc, au Maghreb, en Asie. Mais il refuse de précipiter les choses. « Ce que j’ai vécu ici, je ne l’aurais vécu nulle part ailleurs. Alors je savoure. Je travaille. Et je me dis que ce n’est qu’un début. »

    Ce passage togolais restera une parenthèse précieuse, peut-être même fondatrice. « J’étais venu pour retrouver ma forme. J’ai retrouvé bien plus : du sens, une envie, et une certaine paix intérieure. »

    Ainsi, en posant ses valises à Sokodé, Khalil Touhami n’a pas seulement rejoint un club ou disputé quelques matchs dans l’anonymat d’un championnat africain sous-exposé. Il a pris un risque. Celui de sortir des sentiers battus, d’aller là où personne ne l’attendait. Là où aucun joueur marocain n’avait encore mis les pieds.

    Son choix, dicté par l’envie de se reconstruire, aura été tout sauf confortable. Mais il aura révélé un état d’esprit irréprochable : celui d’un joueur prêt à sacrifier le confort pour le terrain, l’étiquette pour l’apprentissage, les projecteurs pour la profondeur.

    Ou tout simplement pour l’amour du foot.

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