L’Argentine, pays du tango, où le football est une religion, une passion folle allant au-delà de l’entendement. Le moins que l’on puisse dire, c’est que l’Argentine nous a offert bien de grands noms et de solistes du ballon rond : Alfredo Di Stefano, Mario Kempes, Diego Armando Maradona, Burruchaga, Jorge Valdano, Pablo Aimar, Fernando Redondo, Marcelo Gallardo, Juan Roman Riquelme et sans doute le meilleur joueur de l’histoire de ce sport, Lionel Messi. Autant dire, que l’Argentine est un vivier de techniciens beaux à voir jouer. Pourtant, elle nous aussi pondu un gars qui n’aimait pas le football lors de sa tendre enfance et qui par la force des choses, devint un des plus grands attaquants à avoir foulé les rectangles verts : J’ai nommé Gabriel Omar Batistuta alias Batigol. Focus.
Natif de Reconquista, le 1 er Février 1969, Gabriel Omar Batistuta, contrairement à la majeur partie des enfants Argentins se passionnent plutôt pour le volleyball alors qu’au pays du Tango, c’est le football le sport Roi. Il ne découvrira le ballon rond qu’à l’adolescence, initié par ses amis de l’époque. Moins à l’aise balle aux pieds, qu’avec ses mains, Gabriel s’inscrit dans un club de son quartier en tant que gardien de but mais démontre un certain flair lorsque, juste pour le fun, il se mue en attaquant. Cet instinct naturel, certes non associé à une technique magique dans la lignée de la tradition Argentine, attirera tout de même l’œil experte des recruteur des Newell’s Old Boys, club pour lequel il signera son premier contrat professionnel, à l’âge de dix neuf ans. Le jeune Gabriel participe pour la saison 1988-1989 à vingt neuf rencontres totalisant dix buts, toutes compétitions confondues : sept en championnat, trois en Copa Libertadores. Il se fera justement en nom en Amérique du Sud à travers la compétition continental par excellence, source de convoitises des plus grands clubs sud-américains à l’image des Boca Juniors, River Plate, Santos, Sao Paulo, Penarol et bien d’autres formations. Les Newell’s atteindront justement la finale et s’inclineront face aux Uruguayens du Nacional Montevideo. Batitusta quant à lui, impressionnera par sa grinta, sa rage de vaincre et surtout sa recherche systématique du cadre.
Ses performances sur la scène continental, lui permettront de rejoindre le richissime club de Buenos Aires, pensionnaire du Estadio Monumental, River Plate. Il n’incrira que quatres petits buts en 21 recontres de championnat pour River et se verra indiquer la porte de sortie. Ironie du sort, c’est le rival honni, Boca Juniors, qui donnera à Gabriel une chance de se relancer et l’attirera dans ses rangs. En compagnie de guerriers à l’image de Cabanas, Marcico et Simon, Gabriel s’éclate et fais chavirer par ses treize réalisations en trente rencontres de championnat, ses six pions en dix parties de Copa Libertadores, au peuple de la Bombonera, de s’enflammer et de chavirer à nouveau. Son apport offensif prolifique permettra à Boca la populaire, de remporter le championnat Argentin 1990 après onze d’attentes et le dernier sacre glanné par la légende vivante, El Pibe de Oro Maradona. Ayant fait ses preuves au pays, il est temps pour Batigol de rejoindre à l’été 91, l’Italie, et plus précisemment la Fiorentina, qui recherchait désespéremment un remplaçant à son joyau perdu Roberto Baggio. Il honore entre temps, sa première sélection avec l’Albiceleste sous les ordres de Coco Basile, face au Brésil le 27 juin 1991 et fait partie du groupe retenu pour la Copa America 1991 qui se jouera au Chili, en l’absence de l’idole Maradona, mais en compagnie de Claudio Cannigia, Diego Simeone, Fernando Redondo ou encore Sergio Goycoechea. Il entame son tournoi par un doublé face au Venezuela, récidive par le but de la victoire contre le pays hôte et ouvre le bal contre le Paraguay. L’Argentine termine première de la poule A et se qualifie pour la championnat final, la Copa America étant jouée sous la forme d’un mini championnat à l’époque. Ses deux buts décisifs face respectivement, au rival Carioca et aux cafeteros Colombien permettront à l’Argentine de s’adjuger le graal continental. Voilà donc Gabriel fin prêt pour l’Europe.
Il débarque donc en Toscanne à l’aube de l’exercice 91-92, et est sensé constituer avec le frère de Michael Laudrup, Brian Laudrup et l’Allemand Effenberg, un trio d’attaque à même de permettre à la Viola de concurrencer le Milan AC et la Juve pour le scudetto. Il inscrit treize buts en vingt sept apparitions en Calcio Serie A et un but en trois match de Coppa Italia. Bilan statistique assez respectable pour un jeune attaquant, novice d’un championnat acquis à la cause des défenseurs rugeux et roublards, mais insuffisant pour placer la Fiorentina en haut du tableau, la viola terminant seulement douzième. La presse Italienne s’en donne à cœur joie, dénigrant la valeur de Batigol. Il marquera trois buts de plus en Serie A, la saison suivante mais ne pourra pas éviter la descente de son club en Serie B. On le voyait partant, surtout qu’il doit tenir son rang en séléction en vue du mondial Américain qui se tiendra à l’issue de cette saison 93-94, synonyme de purge mais décidera de continuer l’aventure à Florence. Il gagne alors le respect, l’amour et la considération des tifosi de l’Artemio Franchi. L’été 93, lui donnera l’occasion d’oublier un peu ses déboires sportifs en Italie, puisqu’il fera partie du groupe Argentin dont l’objectif est de défendre sa couronne continental, lors de la Copa America tenu en Equateur. Batigol ne terminera meilleur buteur du tournoi, comme il y’a deux ans, mais inscira trois buts importants, dont celui de la délivrance lors du premier match contre de valeureux Boliviens, et un doublé en finale face au Mexique, permettant à l’Albiceleste d’asseoir sa domination Sud Américaine. Il revient gonflé à bloc en Italie, martyrise les défenses de Serie B tout au long de l’exercice 93-94, claquant seize buts en vingt six match de championnat et contribuant largement à la remontée express de la Fio parmi les cadors de l’élite.
Il s’envole donc aux Etats Unis, auréolé de deux Copa America avec une Argentine revancharde, qui a récupéré son gamin en or, Maradona au pic de sa forme, déterminée à regagner le titre suprême et effacer le douleureux souvenir de la finale perdue quatre ans plutôt face à l’Allemagne quatre ans plutôt. Avec Batigol, Simeone, Redondo, Ortega, Redondo et surtout Diego, l’Argentine présente une équipe de monstres au Mondial Américain et est désignée comme favori de la compétition. Dans un groupe supposé largement à leur portée, les gauchos commenceront leur tournoi par une victoire nette et sans bavure, face à la Grèce, Batigol inscrivant un triplé à l’occasion de sa première participation à une coupe du monde avant que Maradone ne clôture le bal par une lourde frappe en pleine lucarne, et une célébration îconique, pupille grandes ouvertes devant la caméra. Ils réussiront à battre difficilement les Super Eagles du Nigeria, et perdront le dernier match du groupe face à la Bulgarie de Stoichkov et Kostadinov, s’extirpant de la phase de poules en troisième position derrière le Nigeria et la Bulgarie. Entre temps les analyses anti dopage de Maradona, s’avèront positives. Le génie est exclu du tournoi par la Fifa et c’est toute l’Argentine qui tombe de haut. Malgré son penalty transformé face à la Roumanie en huitième de finale, l’Albiceleste se fera bousculer par Georghe Hagi et compagnie et quittera prématurément le tournoi. Première grosse déception mondialiste pour Gabriel, qui en appellera d’autres. Pour son grand retour en Serie A, Batigol survole les débats dans la course au Copacannoniere, inscrivant vingt six buts en trente deux match de championnat. La viola ne se classera que dixième, mais voilà Gabriel bien partit pour marquer l’histoire du club Florentin.
Vient alors l’été 1995, celle de la Copa America, sa compétition de prédilection sur la scène internationale. Il rêve donc, vue son état de forme et dans le sillage de son époustouflante saison Italienne, à amener l’Albiceleste à réaliser la passe de trois. Comme à son accoutumée, Gabriel ouvre le bal face à une vielle connaissance : la Bolivie. Il participe au festival offensif face aux Chiliens mais assiste incrédule à la rouste infligé par les Etats Unis lors du dernier match de la phase de poules. Il marquera à nouveau en quart de finale contre le Brésil, mais l’Argentine se fera quand même éliminer aux tirs aux buts. La saison 95-96, lui permettra d’enfin rajouter une ligne à son palmarés en Italie, puisqu’avec ses huits buts en huits de Coupe, il emmène sa Viola vers le sacre en Coppa Italia glanné par 3-0 sur le cumul des deux rencontres, face à l’Atalanta Bergame. Il envoie donc la Fiorentina en coupe des coupe pour l’exercice 97, sa première participation à une coupe d’Europe à presque trente piges. Epaulé par un jeune gardien dénommé Francesco Toldo et un meneur de jeu Portugais à l’incroyable vista, un certain Rui Costa, il remporte la Supercoupe d’Italie en détriment du Milan AC, marque treize buts en trente deux recontre de Serie A et quatre buts en 7 matchs de C2, emmenant la Viola jusqu’en demie finale pour se faire éjecter par le Barça d’un Ronaldo étincelant. A son grand désarroi, la Viola ne terminera que neuvième de l’exercice 97 et ne jouera pas l’Europe la saison suivante. Batigol devra se contenter du championnat et d’une concurrence accrue pour le titre de Copacannoniere avec l’arrivée de Ronaldo à l’Inter ou encore la présence de Bierhoff du côté du Milan, Del Piero et Inzaghi chez les bianconeri. Il inscrit vingt un buts en trente et une rencontres en Serie A et sous son impulsion, la Viola se classe cinquième et se qualifie pour la Coupe UEFA.
Il se présente donc au Mondial 98, gonflé à bloc, déterminé en compagnie des Ortega, Simeone, Crespo,Ayala, Veron, Cambiasso, Gallardo, a accroché une troisième étoile sur l’écusson Argentin en terre Française. Sous la houlette de Daniel Passarella, Il marque le but de la victoire in extremis contre le Japon, claque un triplé face à la Jamaique et, est mis au repos pour la petite finale face aux surprenants mais séduisant Croates de Suker, Boban et Bilic. L’Albiceleste retrouve un vieux rival historique en huitème de finale à Sain Etienne, en l’occurrence l’Angleterre des Scholes, Campbell, Keown, Beckham et du feu follet de la Mersey Side, Michael Owen. Il marque son cinquième et dernier but du tournoi et assiste depuis le banc à la victoire des siens aux tirs aux buts. Malheuresement, il ne permettra pas à l’Argentine de dépasse l’obstacle néerlandais et le génie de Dennis Bergkamp en quart de finale sous la canicule Marseillaise. De retour à Florence, il se voit agrémenté par la direction du club, de renforts de poids : Pedrag Mijatovic, Enrico Chiesa ou encore Toricelli qui viennent s’ajouter aux Edmundo et Rui Costa, de quoi enfin récompenser les efforts de la star Argentine et l’amener vers le Scudetto. Il incrit 26 buts en 37 matchs toutes compétitions confondues, dont vingt et un en Serie A. La viola terminera troisième et se qualifiera pour la C1. Batitusta va enfin découvrir la Ligue des Champions, un comble pour un buteur de cette envergure. D’ailleurs, il se sublimera lors de cette campagne européenne 99-2000, incrivant quatre buts en cinq rencontres et permettant à la Fiorentina de se qualifier pour le second tour au détriment d’Arsenal en marquant une merveille de but du droit, crucifiant Seaman et la défense des Gunners en plein Wembley et terminera avec 23 buts en Serie A. Impatient et voyant ses plus belles années derrières lui, Gabriel comprendra que Viola ne pourra lui assouvir son désir de sacre national et décide, après neuf ans passées en Toscanne, 207 buts en 333 rencontres disputés devenant ainsi le meilleur buteur de l’histoire du club, à quitter sa Viola et rejoint à l’été 2000, une ambitieuse équipe de l’As Roma pour former avec Totti et Montella un trio de choc, chapeauté par l’exigeant et expérimenté Fabio Capello. Ses vingt buts en vingt huit recontres de Serie A, emmèneront la Roma vers un Scudetto longtemps attendu. Champion d’Italie, Gabriel n’est plus que l’ombre de lui même pour les deux saison suivantes : le buteur se fait vieux et cède sa place à un jeune Antonio Cassano. Le mondial 2002, dernier occassion pour lui de remporter la coupe du monde, sera à l’image de sa fin de carrière un couac absolu : l’Argentine se fera éliminer dès le premier tour alors qu’elle présentait un effectif pléthorique et une armada offensive, au détriment de l’Angleterre et de la Suède. Il rejoint l’Inter au mercato hivernal 2003, mais ne sera que l’ombre de lui-même se contentant de bouts de match et totalisant 2 buts en douze match sous le maillot nerrazuri. Il décide de terminer sa carrière à Al Arabi au Qatar et en profitera pour marquer 25 buts en 21 rencontres dans ce championnat exotique. Ses problèmes de genoux et son manque de motivation, pousseront l’un des meilleurs attaquant de la décennie dorée des années 90 à annoncer sa retraite en 2005, à l’âge de 36 ans.
Que peut on dire de Gabriel Omar Batistuta ? Si qu’il était en son temps, un buteur clinique, certes pas le plus plus fin techniquement, mais un artilleur un vrai. Celui qui, à l’approche des derniers dix huit mètres, oublie ses coéquipiers, privilégiant le son des filets qui tremblent, la recherche constante du cadre. Un tueur égoiste devant le but, préférant largement mystifier un gardien effrayé que de faire briller un copain mieux placé. Batigol est ses célébrations de sniper, sa tignasse rebelle, ses frappes lourdes, ses buts à la pelle et l’image d’un attaquant sèmant la terreur chaque week end en Italie.
YOUNES CHARIFI